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Méthode de conception innovante pour la sécurité des opérateurs

Le déclencheur de ce travail est une sollicitation du LURPA par le Cemagref. Le besoin de recherche provient des chiffres alarmants des accidents mortels provoqués par certains sous-ensembles du machinisme agricole et en particulier par la liaison tracteur-outil. La prise en compte de la réglementation et des normes de sécurité en phase finale de conception par les constructeurs de moyens ne réussit pas à traiter le problème. Il nous a été demandé de trouver une méthode de conception plus efficiente intégrant la sécurité des opérateurs. Pour répondre à ce besoin, nous avons construit un projet de collaboration entre l'équipe Géo3D du LURPA et l'équipe Risques et conception mécanique de l'unité de recherche TSAN (Technologie pour la sécurité et les performances des agroéquipements) de l'IRSTEA (Cemagref).


Objectif des travaux

Les travaux réalisés dans ce cadre ont fait l'objet dans un premier temps de la thèse de Rima Ghemraoui qui a été soutenue en novembre 2009. Cette thèse avait pour objectif de mettre au point une méthode de conception intégrant les solutions techniques et la sécurité humaine.

  Ce travail de thèse est à l'intersection de deux domaines scientifiques, celui de l'analyse des risques opérateurs et celui des théories et méthodes de conception. Les activités issues de ces deux domaines sont considérées séquentielles de par les caractéristiques inhérentes de chacune. Cependant, le retour d'expériences montre que ce type d'approche séquentielle ne permet pas d'atteindre les résultats escomptés. Il est apparu le besoin d'une prise en compte simultanée de ces deux disciplines tout au long de la conception des produits. Néanmoins, la première problématique, à laquelle, les chercheurs ainsi que les concepteurs se sont confrontés est la suivante : Comment analyser et identifier les risques, au plus tôt dans la conception, aux étapes où peu de détails concernant le produit ont été effectués ? Malgré les études menées dans le domaine de la prise en considération des données incertaines au plus tôt dans le processus de développement d'un produit, les zones d'ombres restent multiples. Certains travaux se sont penchés sur la pluridisciplinarité nécessaire des acteurs de la conception. Aucun moyen méthodologique n'avait alors été proposé. D'autres travaux s'appuient sur la prise en compte du retour d'expérience. Ce dernier aspect manque cependant encore de formalisation pour être intégré d'une manière structurée dans la conception d'un nouveau produit. La nécessité de disposer de méthodes et d'outils d'assistance pour fusionner les notions techniques et celles de la sécurité humaines constitue le cadre dans lequel nous avons mené nos travaux. L'objectif de cette thèse est de proposer une méthode de préconception basée sur les outils méthodologiques existants et permettant l'intégration structurée et formelle de la sécurité des utilisateurs. Cette méthode se basera sur la définition et l'expression des exigences de sécurité tout au long du processus de conception. Ainsi, la synthèse des solutions techniques s'effectuera simultanément sur la base des exigences de sécurité et les exigences techniques.

Pour faire suite aux résultats encourageants de la méthode IRAD (Innovative Risk Assessment Design) proposée par R. Ghemraoui, une seconde thèse a été engagée.  Les objectifs de la thèse de Leyla Sadeghi sont de consolider la méthode IRAD et la rendre opérationnelle.


    Principaux résultats obtenus

    L'idée initiale a été de prendre en compte l'analyse des risques tout le long du cycle de conception. La méthode IRAD proposée, s'appuie sur les trois phases de la conception systématique de Pahl et Beitz (Conceptual, Embodiment et Detail) et sur les deux domaines de la théorie Axiomatic Design de Shuh (Functional et Physical). A chacune de ces 6 étapes correspond une activité d'analyse des risques,  au niveau des spécifications et au niveau des choix du concepteur. La méthode est déployée pour trois situations de conception, la prise en compte du retour d'expériences, l'analyse de solutions existantes et la synthèse de solutions de conception. Au-delà de la méthode proposée, l'apport de ce travail concerne la formalisation des exigences de sécurité dans le cahier des charges de conception et leur exploitation dans la recherche de solutions constructives.

    Une première contribution scientifique résulte de ces travaux : un modèle conceptuel d'intégration de la sécurité et de la conception. Ce modèle est alors basé sur une représentation systématique du processus de conception qui va permettre la création et la représentation systématique d'un processus des risques. De ce modèle va découler un premier apport original : une vision du risque non pas comme une résultante du produit entier, mais une dégénération du besoin ; des concepts et par suite des grandeurs physiques ; de l'architecture et ainsi des caractéristiques spatiales et géométriques et enfin des composants et des données comportementales qui s'ensuivent. Un deuxième apport original réside dans la création des contextes du risque. Ainsi, nous avons six contextes décrivant chacun un point de vue de la sécurité suivant l'état d'avancement du développement du produit.

    Cette méthode baptisée « IRAD method » permet trois cas d'emploi : (1) l'expression des exigences de sécurité à travers l'analyse et l'abstraction structurée du retour d'expérience, (2) l'expression des exigences de sécurité à travers l'analyse des risques des choix techniques au cours de la conception et (3) la synthèse des solutions intégrant les exigences de sécurité. Les outils de formalisation des différents cas sont aussi donnés. La méthode IRAD a été appliquée au cas industriel de la liaison trois points entre un tracteur et une machine et l'analyse d'un point de vue technique et de sécurité a permis de dégager de nouvelles exigences de sécurité et de proposer quelques principes de solutions sécuritaires. Un principe a fait l'objet d'une recherche de solution constructive qui a fait l'objet d'un dépôt de brevet par le Cemagref. Le travail réalisé à fait l'objet de trois distinctions, 1- meilleure conférence à ICAD 2009, 2- prix recherche-industrie de l'IMdR, 3- médaille d'argent 2010 de l'Académie d'Agriculture.


    Commentaires

    La mise en œuvre de la méthode IRAD reste délicate à conduire par les concepteurs compte tenu du manque de support informatique. Les travaux de thèse de Leyla Sadeghi visent à formaliser l'ensemble des données et des connaissances liées au retour d'expérience pour offrir aux concepteurs un environnement d'aide à la décision. Deux processus ont été formalisés. Un premier noté FRE (Functional Reverse Engineering) permet d'analyser selon IRAD une solution à risques (cas d'emploi 1) afin d'exprimer les nouvelles exigences et un second noté FR2E (Functional Re-engineering) permet à partir de ces nouvelles exigences de proposer de nouvelles solutions constructives. L'application retenue pour la validation est l'arbre de transmission entre un tracteur et une machine.